Pourquoi l’automatisation doit servir l’humain autant que l'entreprise?
par Emmanuel Olivier, Directeur Général d'Esker
Statistiques, ratios, formules, feuilles de calcul Excel, et ROI : nous avons là un échantillon des éléments que doit maîtriser tout bon directeur financier. Alors qu’aucun de ces concepts n’est capable de soulever un enthousiasme spontané, on pense souvent que les directions financières ne font qu’interagir avec des chiffres froids et inflexibles. Cependant, pour être réellement efficace, il leur faut également bien comprendre les politiques, workflows et procédures de leur entreprise — tout cela, bien sûr, en veillant à ce que l’ensemble de leurs calculs connexes soient corrects.
En outre, leurs fonctions se sont complexifiées à la suite d’une accumulation de facteurs, de la hausse des prix à la consommation à l’instabilité des marchés de l’emploi, en passant par la faible augmentation de l’activité conjuguée à une réduction des marges bénéficiaires. Tout cela dans un contexte de relative incertitude, offrant des perspectives économiques peu reluisantes.
C’est au directeur financier qu’il revient d’équilibrer le tout : ces professionnels doivent évaluer les opportunités de croissance de leur entreprise en pondérant les risques, tout en accélérant les processus clés, pour rester en phase avec leur environnement de marché. Et idéalement, tout cela doit s’opérer rapidement et sans anicroche. Heureusement, l’automatisation des processus métiers peut avoir un énorme impact sur l’efficience et l’efficacité des workflows, la visibilité sur les données et la réduction des erreurs résultant notamment de la saisie manuelle de données.
De l’importance de connaître l’origine des déductions, réclamations et litiges
Au cœur de l’imprévisibilité des chiffres d’affaires, de la hausse des frais, des délais de paiement réduits et des échecs de recouvrement se nichent les déductions, réclamations et litiges. Ces pratiques sont particulièrement fréquentes dans le secteur des biens de grande consommation, notamment dans le cadre des interactions entre distributeurs et fabricants.
Les promotions, remises et réductions réalisées dans le cadre d’accords commerciaux aboutissent généralement à des moins-perçus. Ces écarts de trésorerie, fruits de la différence entre les montants facturés et les montants réellement payés, peuvent représenter jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires total d’une entreprise. Or, même d’infimes perturbations peuvent affecter la santé financière d’une organisation.
Selon un rapport publié récemment par IOFM* (Institute of Finance and Management), 56 % des marques de biens de grande consommation ne prennent aucune mesure proactive pour minimiser leurs décomptes, et 24 % d’entre elles n’ont pas automatisé la moindre étape de leur processus de gestion des déductions. Si une crise vient en plus gripper ces rouages, l’effet boule de neige n’est jamais loin : 28 % des responsables des comptes clients estiment que leur organisation a dû faire face à davantage de réclamations avec la pandémie de COVID-19.
Quand les investissements ne portent pas suffisamment leurs fruits
Afin d’affronter toutes ces tempêtes, beaucoup d’entreprises ont pris la décision d’investir dans de nouvelles technologies pour rendre leurs processus métiers plus efficients et rationalisés. En soi, il s’agit d’un bon début pour relever ces défis. Malheureusement, certaines d’entre elles se retrouvent dans une situation où les outils adoptés ne remplissent pas leurs promesses. Selon l’enquête de PwC Cloud France 2023, 58 % des organisations françaises ont adopté le cloud dans la plupart ou la totalité des fonctions de l’entreprise. Pourtant, elles sont 94% à éprouver des difficultés à tirer une valeur tangible de leur passage au cloud.
Même lorsque ces technologies ont été soigneusement évaluées et budgétisées, elles peuvent produire des résultats en dessous des attentes. Souvent, elles ne communiquent pas correctement l’une avec l’autre, manquent de flexibilité, et leurs données sont désorganisées et fragmentées.
Or, si la gestion des déductions est déjà une tâche compliquée pour les services financiers, ces difficultés peuvent avoir des ramifications jusqu’au service client, au marketing, aux ventes et au département informatique. Le temps consacré à ces problèmes distrait ces équipes de leurs principales responsabilités et autres tâches à haute valeur ajoutée.
Les directions financières se doivent de calculer le coût exact de l’investigation et de la résolution manuelles des déductions — c’est-à-dire multiplier le nombre d’individus impliqués dans ce processus par le temps moyen consacré par chacun d’entre eux et par le coût salarial. En ajoutant à ce résultat l’ensemble des frais de gestion annexes, le total est souvent inquiétant, voire alarmant.
Des fondations instables
Le problème sous-jacent à la plupart des difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre d’un projet d’automation est que le cycle financier n’est pas pris en compte dans son intégralité. Autre difficulté potentielle à ne pas oublier : les nouvelles technologies sont souvent intégrées avec des systèmes et processus obsolètes. On le découvre généralement lors de la phase d’implémentation, quand des pilotages de gestion du changement doivent être abandonnés pour des questions de coûts et de contraintes de temps. Il n’est pas rare de constater une implication humaine limitée à cette étape — en particulier lorsque ce processus prend beaucoup de temps — et une certaine négligence en matière de formation. Les équipes se retrouvent alors avec de nouveaux équipements et logiciels, armées uniquement d’un tutoriel ou d’un manuel pour les guider. Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que le retour sur investissement soit faible.
N’oublions pas que le fournisseur sélectionné doit pouvoir proposer une formation et un accompagnement pendant, et après la mise en œuvre de l’outil. L’important est que le donneur d’ordre et son prestataire gèrent les tâches ensemble et apprennent de chaque problème qui se présente, afin de développer des solutions qui s’adapteront à une multiple variété de scénarios. En résumé, il faut une relation étroite créant plus de valeur, et allant au-delà de simples technologies.
Les entreprises réussissant la mise en œuvre de l’automatisation ont besoin de 41 % moins de capacité de travail à temps plein pour gérer leurs décomptes que leurs homologues. De plus, cette approche accélère la résolution des litiges liés à des règlements partiels de 15 jours en moyenne**. Un bon point pour la trésorerie.
À elle seule, l’automatisation ne résoudra pas tous les problèmes, et ne saurait être le rempart ultime face à des circonstances imprévues ou incontrôlables. Cependant, elle reste un levier clé pour gérer et optimiser des processus complexes. En y ajoutant une touche humaine, et en veillant à ce que la communication et la visibilité soient étendues à tous les niveaux et fonctions de l’organisation, les bénéfices de notre collaboration avec les technologies deviendront à la fois mesurables et puissants.
* Comment l’automatisation de la gestion des décomptes permet de gagner du temps, et de réduire les coûts et la complexité de la gestion des comptes clients. 2022. IOFM.
** Inmar Intelligence, rapport 2022 Deductions Management Trends Report