L’Intelligence Artificielle est aussi dans le back-office

PAR JESUS MIDON , DIRECTEUR DE LA FILIALE ESPAGNOLE D’ESKER

Article publié le 3 mars 2018 dans Computerworld

TOUTES LES PRÉVISIONS EN MATIÈRE DE TECHNOLOGIES D’AVENIR CONSIDÈRENT L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE COMME L’UN DES GRANDS ENJEUX DU NOUVEAU MONDE QUI NOUS ATTEND.

Toutes les prévisions en matière de technologies d’avenir considèrent l’Intelligence Artificielle comme l’un des grands enjeux du nouveau monde qui nous attend. Cette trajectoire est encore plus flagrante lorsque nous observons les grands noms du secteur : ils se lancent dans des investissements et des initiatives stratégiques afin d’être bien positionnés, au bon moment, avec déjà les réponses à apporter. Gartner prévoit qu’en 2025, l’Intelligence Artificielle sera devenue l’outil indispensable pour redéfinir l’expérience client et réinventer les modèles commerciaux.

Au-delà de ce que nous réserve l’Intelligence Artificielle au sens large, et d’ici à ce que nous soyons capables de concrétiser, voire de dépasser, les visions qui ont germé dans les esprits de Kubrik ou d’Asimov, l’accent est aujourd’hui principalement mis sur l’aspect réaliste de cette technologie, à savoir le machine learning. Celui-ci correspond au développement de techniques qui permettent aux ordinateurs d’accéder à d’immenses bases de données afin d’apprendre et de mémoriser des comportements, pour ensuite parvenir à prendre des décisions par eux-mêmes. Dans ce domaine, nous avons déjà pu vérifier une bonne partie du potentiel de l’Intelligence Artificielle : reconnaissance vocale, analyse prédictive des données, diagnostics et essais cliniques, utilisation dans les secteurs de la publicité et du marketing, etc. Il reste cependant beaucoup de chemin à parcourir et, surtout, les entreprises ont encore de nombreuses opportunités à découvrir.

L’un des points qui n’a pas encore été réellement abordé est l’impact de l’Intelligence Artificielle, et plus précisément celui du machine learning, sur les processus administratifs, c’est-à-dire au niveau des systèmes back-office des entreprises. Nous parlons ici de technologies basées sur des algorithmes qui apprennent des tâches en vue de les répéter à l’infini et de gérer des quantités considérables de transactions, le tout avec un minimum d’erreurs. De ce fait, l’homme est vaincu par la machine non pas sur la qualité du travail, mais sur la quantité. Dans une récente enquête publiée par Deloitte, les entreprises estiment que le recours à des systèmes d’automatisation des processus robotiques (Robotic Process Automation, RPA) pourrait permettre de libérer 20 % de la capacité d’un employé à temps plein. Les entreprises ayant déjà automatisé leurs processus déclarent même qu’elles sont parvenues à libérer jusqu’à 52 % du temps de travail.

À l’heure actuelle, le principal intérêt de l’Intelligence Artificielle pour les entreprises réside dans la productivité et la qualité du travail fourni. L’automatisation simplifie les opérations comptables et en diminue le nombre, tout en réduisant la quantité de ressources nécessaires. Les coûts directs et les inefficacités liées à la gestion manuelle sont ainsi éliminés. En confiant ces tâches répétitives à des « machines pensantes » et ne plus s’en préoccuper, permet aux équipes de consacrer davantage de temps à des activités offrant une véritable valeur ajoutée aux clients et à l’entreprise. Elles disposent en outre d’informations pertinentes en temps réel, pour une meilleure prise de décision. Enfin, l’amélioration des résultats n’est pas linéaire, mais bien exponentielle. Les systèmes basés sur le machine learning, lorsqu’ils sont utilisés au quotidien, étoffent leurs connaissances en continu et les appliquent immédiatement, avec à la clé une augmentation progressive des performances.

Le débat fait rage pour savoir si l’Intelligence Artificielle finira par remplacer l’être humain et, par conséquent, provoquer la disparition de certains emplois. De nombreuses études, plus ou moins rigoureuses ou hasardeuses, ont été publiées à ce propos. Selon nous, cela ne se produira pas. D’après un rapport de Cap Gemini, les sociétés qui exploitent déjà l’Intelligence Artificielle créent plus de postes qu’elles n’en détruisent. Notre propre expérience en matière d’automatisation des processus de gestion (recouvrement et paiement des factures, gestion des commandes, résolution des litiges, etc.) nous prouve qu’en matière de tâches administratives, associer des machines et des personnes permet d’optimiser les résultats. Nous aurons donc besoin des machines, et plus elles seront intelligentes, mieux ce sera. Mais elles auront surtout vocation à rendre les personnes plus compétentes et, par là même, les entreprises plus efficaces. Comme toutes les technologies, la RPA et l’IA présentent un intérêt si elles servent un objectif concret, dans le cas présent, l’efficacité. Néanmoins, l’être humain demeure indispensable pour les diriger et définir ce que nous attendons d’elles.

La réalité est cependant tout autre : le système back-office de beaucoup d’entreprises est très loin d’être intelligent. N’importe quel responsable qui visite la “salle des machines” de ses services administratifs pourra constater les nombreuses inefficacités qui existent au quotidien. Ces dernières affectent la productivité et, du fait de leur impact sur l’ensemble de la Supply Chain, elles ternissent également l’image de marque des sociétés. Nous sommes bien conscients que ce scénario n’est pas idéal pour démontrer tous les attraits de l’Intelligence Artificielle. Mais il s’agit sans doute de celui dans lequel elle est la plus indispensable. Il est tout à fait louable d’utiliser les technologies émergentes là où elles sont visibles. Mais si nous nous appuyons également dessus en coulisse, peut-être en tirerons-nous un meilleur parti.

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